woensdag 22 oktober 2008
Syndrome d'aliénation parentale - partie B
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3.4. DESCRIPTION DU SAP
3.4.1. DES RELATIONS DE BASE FAUSSEES
3.4.1.1. La triangulation
Le SAP se conçoit plus aisément en se basant sur la triangulation familiale de base : le père, la mère, (ou assimilés probablement dans les couples homosexuels s’il y a lieu), le ou les enfants qui représentent le troisième pôle.
Normalement, on a le schéma suivant :
Figure 1 : Triangulation
Dans des rapports considérés comme sains ou normaux, chacun a une place bien attribuée. Pour simplifier, prenons le modèle classique du père et de la mère. On pourra très bien réutiliser le modèle en remplaçant le « père » et la « mère » arbitrairement définis par parent n°1 et parent n°2. La mère porte son enfant et la relation est fusionnelle dans les premiers mois. Le père en tant que tierce personne va protéger la mère lors de cette relation fusionnelle puis aider l’enfant à quitter cette relation de fusion pour s’intéresser peu à peu au monde extérieur et communiquer autrement. Il va sortir l’enfant de la toute-puissance que lui conférait cette relation si intime avec sa mère. Plus tard, il se peut que la mère intervienne à son tour comme tierce personne pour rééquilibrer une relation trop fusionnelle avec le père. Ainsi, par le jeu des échanges, l’enfant va progressivement construire sa personnalité à partir d’un modèle masculin et féminin, ou plus simplement à partir de la notion de différence entre les deux parents. Cette différence relativise le poids décisionnel et autoritaire de chaque parent, le poids de sa personnalité. Chacun a la place de se construire et d’exister dans le respect et la différence. Elle permet l’expérimentation d’une altérité et la construction de la personnalité de l’enfant.
Attention, il faut préciser ici la différence entre les mères célibataires abandonnées ou veuves et les parents aliénants. Les parents aliénants verrouillent d’emblée toute possibilité d’altérité et/ou la nient en constituant de fait un abus de pouvoir tandis que les parents seuls, sains, sont théoriquement capables de construire des relations fondées sur l’altérité pour l’enfant.
Par ailleurs, dans cette relation de triangulation, si chacun est à sa place, dans une vision idéale, les parents protègent les enfants, respectent leurs besoins fondamentaux, leur enseignent les limites à ne pas franchir et ainsi les élèvent, c'est-à-dire les aident à grandir.
Les enfants quant à eux respectent et obéissent (la plupart du temps !!) à leurs parents. Là encore, attention, je ne parle pas de respect servile, mais bien plutôt de reconnaissance, d’acceptation et de l’apprentissage de la vie en communauté avec les parents.
3.4.1.2. Réorganisation de la triangulation lors d’un divorce
Lors d’un divorce, le lien entre les deux parents est coupé, mais les parents communiquent toujours (plus ou moins difficilement) dans l’intérêt de l’enfant. Même si leur vie de couple n’existe plus, la parentalité reste. Ils se retrouvent forcés d’échanger au sujet des horaires de garde des enfants, de leurs vacances, de l’école, des notes, des amis, des loisirs et sont bien obligés de trouver un terrain d’entente. L’enfant peut préférer l’un ou l’autre des parents (ce qui est toujours le cas à un moment donné) à telle ou telle période, mais un parent sain est conscient de l’importance du maintien des liens avec l’autre parent. Il incitera activement ses enfants à appeler, n’acceptera pas que les enfants parlent de l’autre en termes injurieux. Bien sûr, les rancoeurs peuvent subsister et des dérapages subvenir, personne ne peut être un parent parfait. Mais là encore, il s’agit d’une question de degré de variations de la normale, laissant de côté une éventuelle relation pathologique.
Figure 2 : Triangulation et divorce
La triangulation persiste donc par le biais du lien de parentalité, et s’enrichit éventuellement de nouvelles interactions avec un beau-parent, un demi-frère…
3.4.1.3. Triangulation et SAP
Dans le SAP, tous les schémas classiques sont éclatés. Les relations perdent toute fluidité pour se réorganiser autour d’UN parent dit parent aliénant, qui devient le centre et le « superviseur » de toute communication. Désormais, même en son absence, son souvenir au moins est présent dans l’esprit des enfants, comme pour les protéger ou les mettre en garde contre l’autre parent. Il représente la seule figure d’autorité. Il va inconsciemment ou plus consciemment programmer le bloc des enfants, ainsi que l’entourage afin de valider ce nouveau modèle. L’altérité n’a plus sa place, un seul modèle a le droit d’exister et est reconnu comme bon.
Figure 3 : Triangulation et SAP
Le parent aliénant ne remplit plus sa fonction de protection des enfants du fait du conflit de la séparation, qui le déborde. Une relation fusionnelle s’installe entre le parent aliénant et les enfants (dans certains cas cette relation peut d’ailleurs exister avant la séparation parentale), entraînant une confusion des notions d’identité et d’autonomie chez les enfants.
Le lien de confiance et de soutien mutuel qui existait autrefois entre les deux parents se redéploye entre parent aliénant et enfants. Le lien entre les deux parents est complètement anéanti, la notion de parentalité commune n’existe plus, et le parent aliénant s’arrange pour que le lien parent aliéné /enfants soit anéanti à son tour. Pour cela, il utilise les enfants comme instrument de destruction.
Les enfants deviennent un intermédiaire entre les deux parents, l’instrument de la vengeance et de la haine du parent aliénant. Ils sont en quelque sorte chosifiés. Ils n’ont plus de réel pouvoir décisionnel par eux-mêmes, mais sont subordonnés à l’autorité du parent aliénant.
Si la fratrie comporte plusieurs enfants, le lien entre eux est renforcé du fait de l’objectif commun, éjecter l’autre parent. Ceci concourt à leur donner l’apparence d’un seul bloc.
Les enfants sont soumis à une double contrainte. Ils soutiennent le parent aliénant qui se présente toujours comme victime. Ils le font à la fois parce qu’ils aiment ce parent, et en même temps parce qu’ils savent intuitivement qu’ils seront rejetés s’ils ne le soutiennent pas. Le parent aliénant parentalise les enfants en les élevant hiérarchiquement au même niveau que lui pour un temps, tant qu’il se présente comme victime et seul bon protecteur des enfants. Puis, simultanément, et c’est là que le procédé est pervers, il utilise son autorité naturelle pour inciter par des non-dits l’enfant à rejeter l’autre parent.
L’enfant se retrouve pris au piège de ces liens faussés : il devient à la fois responsable et victime lui aussi de ce processus. Comme le parent aliénant. Mais le parent aliénant « oublie » que ce n’est qu’un enfant et que ses soi-disant « choix » se calquent sur ceux du parent aliénant. L’enfant ne peut pas avoir le même degré de conscience qu’un adulte. Une fois le cercle vicieux du rejet enclenché, une fois que l’enfant a participé à ce processus par des actes, il ne peut plus revenir en arrière. Il a peur d’être rejeté par le parent aliénant, et il a peur de son comportement vis-à-vis du parent aliéné. Et surtout il a goûté à la toute puissance d’être traité comme plus valable que son autre parent par l’anéantissement de tout lien hiérarchique.
La disparition de cette hiérarchie naturelle entraîne une confusion dans la place de l’enfant. Il est tantôt adulte, tantôt enfant, et c’est le parent aliénant qui distribue les rôles. En fait, celui-ci va décider pour l’enfant qui il doit être et quand. D’où l’abus de pouvoir qui en découle, avec la nécessité pour le parent aliénant de maîtriser et contrôler toutes les étapes et toutes les relations s’il veut maintenir cet équilibre factice en place. Les relations des enfants avec le parent aliéné passent désormais au crible de son bon vouloir, même si ce n’est pas dit. En effet, ces relations seront acceptées ou non, en fonction de la situation, et la plupart du temps acceptées et exploitées lorsqu’un enjeu matériel est potentiel.
Le parent aliéné, de son côté, ne peut voir ses enfants que si le parent aliénant le veut bien. Les relations ne sont plus spontanées car toute tentative de sa part est transformée en échec par le reste de la triangulation. Il en est purement et simplement éjecté.
Le terme « inceste platonique » mérite d’être discuté à ce niveau. Cette expression est utilisée par C. Eliacheff et N. Heinich dans leur ouvrage « Mères-Filles une relation à trois » pour mettre en valeur les deux aspects de l’inceste : la sexualité ET l’exclusion d’un tiers. Elle répond à la notion de «l’inceste sans passage à l’acte » définie par Aldo Naouri, qui considère qu’une relation mère-enfant est obligatoirement une forme d’inceste, mais appelle dans le même temps les pères à davantage tenir leur rôle de séparateur. Cette expression « inceste » a l’avantage de souligner les dégâts psychiques encourus par un enfant englué dans une telle relation, fille comme garçon.
A mon sens, P.-C. Racamier explicite mieux que quiconque cette situation lorsqu’il oppose l’inceste à l’OEdipe. L’OEdipe permet la différenciation sexuelle et des générations, l’enfant ligoté dans une relation d’emprise éjecte l’OEdipe au profit de l’incestuel. L’enfant est incapable d’entrer en conflit avec le parent instigateur pour arriver à une autonomisation et à une différenciation suffisantes.
Tous ces éléments sont volontairement schématisés à l’extrême et ne suffisent pas à rendre toute la complexité des différentes situations.
3.4.2. LE PARENT ALIENANT
Au début des années 80 aux Etats-Unis, le parent aliénant était dans environ 85 à 90 % des cas la mère. Ce ratio évolue avec le temps. Aujourd’hui, les mères resteraient le parent aliénant dans 60 % des cas environ.
Le parent aliénant se considère comme le seul bon parent. Le but inconscient ou non est de rejeter voire de détruire l’autre parent et de réparer sa blessure narcissique. Ce parent jouit en apparence de toute sa santé mentale, et sait toujours présenter les faits sous un aspect qui lui est favorable.
Aucune étude à ce jour n’existe, permettant de cerner réellement un profil de parent aliénant. Certains auteurs parlent de « dysfonctionnements parentaux mineurs ». Gardner évoque surtout des personnalités à tendance hystérique ou paranoïaque.
R. Dorey quant à lui détermine deux types de personnalités responsables de relations d’emprise : les pervers et les obsessionnels. P. C. Racamier évoque pour sa part les pervers narcissiques. En réalité, tous les profils de personnalité peuvent se voir, car les instigateurs sont « normaux » et responsables de leurs actes. Des situations de stress peuvent exacerber certains aspects de la personnalité d’un individu. Celui-ci pourrait peut-être revenir à la normale si des cadres clairs lui étaient rappelés.
Nous allons essayer de typer ici deux profils de parents aliénants en simplifiant à l’extrême, pour tenter de démonter leurs mécanismes de fonctionnement…
3.4.2.1. Parent surprotecteur
Le parent surprotecteur se figurera qu’il est le seul « bon » parent, et à ce titre investi de la seule « bonne » autorité capable d’éduquer les enfants. Il croit réellement bien faire et est convaincu de la nocivité potentielle de l’autre parent, qui de toute façon ne pourra pas faire aussi bien que lui. Il s’agit là d’une fragilité narcissique. Ce parent aura tendance à mettre l’enfant dans un cocon pour qu’il ne lui arrive rien. Le parent aliéné étant perçu comme néfaste pour lui dans ses souvenirs et dans sa perception du fait de l’échec de leur vie en commun, il ne pourra assurer l’éducation correctement. L’argument donné peut-être une infidélité, une moins grande compétence pour assurer les tâches ménagères, ou un rapport différent à l’argent. Le parent aliéné sera considéré comme trop autoritaire, ou trop faible, ou le nouveau conjoint ne trouvera pas grâce aux yeux du parent aliénant, bref ce dernier trouvera toujours quelque chose qui n’ira pas et qui constituera une justification suffisante de rejet.
Le parent aliénant se considère comme le seul bon parent, parfait, et multiplie les signes auprès de l’entourage pour être reconnu comme tel. Le modèle psychiatrique le plus proche est l’hystérie. Typiquement, ce parent aura tendance à fabriquer des syndromes de « Münchhausen par procuration ».
3.4.2.2. Parent vengeur
Le parent vengeur agira beaucoup plus consciemment. On peut le rapprocher de la figure du paranoïaque ou encore du pervers narcissique décrit initialement par Racamier, et popularisé par M.-F. Hirigoyen.
Le parent paranoïaque vit dans la peur de l’autre parent et du mal potentiel qu’il peut faire aux enfants. Il sera le premier à accuser l’autre parent de toutes sortes de sévices imaginaires, d’un comportement violent ou totalement inadapté. Il se montrera également très habile devant les tribunaux et pour rallier les anciens cercles d’amis communs à sa cause.
Le pervers narcissique est le plus redoutable. Familier des relations perverses, il utilisera les enfants pour atteindre l’autre à un degré plus ou moins fort. Son but est de détruire, et tous les moyens sont bons. Tout a commencé bien avant la séparation. L’agresseur a déjà multiplié les signaux à l’encontre du parent ultérieurement aliéné afin de le discréditer. Sans qu’il n’y ait de signes évidents. Tout se passe par des non dits,- que ce soit des regards, des petites mimiques- ou par des refus répétés, des humiliations… L’autre n’est jamais assez bien pour lui. Parfois, pour « appâter » ses victimes, le pervers est capable de gentillesse transitoire, soudaine, qui confirmera sa victime dans le fait qu’elle n’a pas fait les choses correctement si son conjoint est désagréable avec elle, qu’elle le mérite. Un climat de peur s’installe. Un cercle vicieux est enclenché, dont la victime mettra du temps à sortir, pour peu qu’elle y échappe. En cas de divorce, une des seules échappatoires possibles, le pervers narcissique continue sa traque. Utiliser les enfants est le « moyen » le plus sensible, celui qui touchera l’autre au coeur. Ainsi donc, en programmant les enfants à détester l’autre, le pervers amplifie le phénomène qu’il avait entamé, et sait intuitivement que c’est le meilleur moyen de détruire infailliblement l’autre dans tout ce qu’il a de plus sensible, à plus ou moins long terme. Il augmente son « stock d’armes » dans la guerre qu’il avait déclaré depuis longtemps, sous des apparences d’amour et de conjoint « parfait ».
Dans toutes ces figures de parents aliénants, tous les artifices en leur pouvoir seront utilisés pour apparaître comme de bons parents aux yeux de la société, car finalement c’est ce qui leur importe le plus. Ils se montrent très habiles dans l’art de mystifier les experts psychiatres, les tribunaux…
3.4.2.3. D’autres motivations inconscientes possibles
Bien sûr, d’autres motivations inconscientes entrent parfois en jeu. La lutte contre la dépression se rencontre régulièrement. Il s’agit d’un conflit paradoxal où le parent a le sentiment de se sentir mieux et met toutes les manifestations psychosomatiques de côté. En fait il lutte contre sa propre dépression en se montrant extrêmement revendicateur.
Dans la confusion transgénérationnelle le parent est infantilisé par son propre parent et utilisé par lui. Les parents du parent aliénant s’impliquent dans le procès.
Beaucoup d’autres motifs peuvent être découverts. Fomenter un SAP permet entre autres de lutter contre un sentiment d’insuffisance, d’impuissance, un manque de confiance en sa valeur propre, ou d’être submergé par la perspective d’une entrevue judiciaire…
Les éléments mis en jeu peuvent être aussi variés que le sentiment de revanche, la culpabilité, la peur de la perte de l’enfant ou de sa première place dans la vie de l’enfant, le désir d’avoir le contrôle absolu de l’enfant, la jalousie à l’encontre de l’autre parent, le désir d’obtenir un moyen de pression pour un meilleur partage post divorce, la volonté d’une meilleure prise en charge matérielle de l’enfant ou d’une pension alimentaire. Une histoire antérieure d’aliénation, d’abandon, d’abus sexuel ou de maltraitance, de problème de manque de sécurité personnelle ou même de perte d’identité peuvent également se rencontrer. Toutes ces raisons, compréhensibles, vont cependant amener le parent aliénant à créer un type de relations mortifères pour l’ensemble de cette famille morcelée.
3.4.2.4. Le visage du parent aliénant : « je contrôle la situation, rassurez vous mes enfants »
Le parent aliénant affiche un masque de victime et sait se montrer le parent solide, digne de confiance en même temps. Il va manipuler, de manière très subtile, parfois à son insu, les enfants pour les amener à faire bloc avec lui et modifier toutes les apparences. Pour cela, les armes sont :
* Son double statut de victime et meilleur parent
Le parent aliénant joue sur deux tableaux et brouille les cartes pour apparaître aux yeux de ses enfants et donc à lui-même comme le seul bon parent.
La victime : Il va réécrire un scenario où il est la victime, et où les enfants sont assimilés à des victimes aussi, ce qui contribue subtilement à dénigrer l’autre parent.
Ce peut être par des propos tenus tous les jours, présentant l’autre sous son plus mauvais jour et responsable de tout. La répétition de ces propos suffira à convaincre l’enfant et à l’imprégner.
Les paroles ne sont pas nécessaires. De petits signes suffisent, comme un haussement de sourcils lorsque l’enfant parle de l’autre parent, une moue qui sous entend beaucoup de choses, en parler comme l’autre, l’évoquer toujours avec un ton méprisant ou le considérant comme accessoire…
Ce peut être par des comportements dramatiques : par exemple se braquer un revolver sur la tempe devant les enfants en affirmant vouloir se suicider car l’autre vous a abandonné…
Il est forcément la victime afin de susciter la pitié : « Ce salaud nous a abandonné », « Cette garce nous manipule ! » Le théâtralisme est de mise, on se présente comme la pure victime convaincante d’une trahison pour attendrir son auditoire, y compris auprès des acteurs sociaux, en jouant sur les notions d’argent et d’abandon notamment. Tout cela concourt à créer un climat de danger dans l’esprit des enfants. Ainsi des mères très riches, qui font des achats extravagants peuvent faire croire à leurs enfants qu’ils sont au bord de la famine.
Cette victimisation va jusqu’à nier tout rôle dans le conflit.
Les hommes aliénants sont encore plus pervers car moins crédibles que les femmes dans ce registre. En effet, les femmes sont souvent (mais pas toujours !) plus vulnérables que les hommes lors d’un divorce du fait de conditions financières et de poste de travail moins rémunérés ou moins stables.
Le meilleur parent : Le parent aliénant joue sur tous les plans en se présentant également comme le seul parent parfait, avec comme corollaire la dévalorisation des capacités parentales du parent aliéné. Il utilisera le sarcasme : « Après toutes ces années, il a quand même réussi à t’emmener lui-même au foot ! », « Je préfère que mon enfant reste avec moi ce week-end, elle est malade » dira une mère au père de sa fille, en présence de l’enfant qui présente un rhume banal lors d’un week-end qu’elle aurait dû passer avec son père.
De fait, la surmédicalisation est fréquente, pouvant atteindre dans certains cas un Syndrome de Münchhausen par procuration.
* Instaurer un climat de peur pour conforter son emprise sur l’enfant
Pour cela, il fait planer en permanence la menace de l’abandon d’une part. L’impression de sécurité de l’enfant est complètement brisée par le divorce initialement. Au lieu de rétablir un milieu qui rassure et protège, le parent aliénant ne reconstruit pas ce climat de sécurité, empêtré dans se propres contradictions conflictuelles qu’il n’a pu résoudre. L’enfant le ressent et s’imagine que le parent qui lui reste peut l’abandonner à son tour.
Le parent aliénant suggère également que l’autre parent est potentiellement menaçant pour l’enfant. Là encore, rien n’est dit, mais un climat est instauré pour que l’enfant s’en persuade. La menace imaginaire est beaucoup plus terrible pour l’enfant que la réalité, car il ne sait pas à quoi s’en tenir.
Ce climat de peur peut se propager jusqu’à l’entourage. Les amis, instituteurs, peuvent aussi être impressionnés par l’attitude très agressive du parent aliénant prêt à tout pour « protéger » son enfant.
* Créer un conflit de loyauté afin de détruire l’autre parent
L’enfant aime ses deux parents et se sent écartelé entre les deux initialement. Il a une position d’ambivalence au moins pour un certain temps. Mais puisque il s’agit d’une guerre il faut prendre position pour survivre. Ceux qui ne font pas le bon choix sont immédiatement rejetés.
Le parent aliénant, par des non-dits, va inciter l’enfant otage à l’action et le transformer ainsi en enfant soldat. Il s’agira d’un petit acte en apparence anodin initialement, mais dirigé contre l’autre parent.
Une fois le processus enclenché, l’enfant est pris au piège. Pris dans sa culpabilité, il ne peut plus revenir en arrière, tout en s’étant séparé de l’autre parent par des actes. Le parent manipulateur lui fera comprendre que s’il a commencé par un geste, il peut aller encore plus loin pour lui plaire. Les actes à l’encontre du parent aliéné se font devant la fratrie, puis les voisins lorsque par exemple ils se roulent par terre en hurlant pour ne pas aller chez le parent aliéné. Ce regard d’autrui pérennise l’acte, le rend irréversible si l’enfant veut rester cohérent avec lui-même et le monde dans lequel il vit, à savoir celui du parent aliénant. L’engrenage est lancé. Le seul mécanisme de survie pour l’enfant, pour s’arracher à sa culpabilité, est le clivage. Une fois clivé, il a « résolu » sa souffrance : pour ne plus ressentir de douleur il suffit de faire disparaître l’autre parent. Ce mécanisme constitue l’un des nombreux exemples de « raisonnement en boucle » du SAP : les enfants se replongent dans leur tourment au contact du parent rejeté. Leurs déclarations typiques « on ne veut plus te voir car tu nous fais souffrir » ou bien « on se sent bien mieux de ne plus jamais te revoir » sont donc partiellement sincères.
* Nier le lien de parenté avec l’autre parent, en désidentifiant l’enfant
Il s’agit du paroxysme de l‘aliénation parentale. Chercher à gommer et effacer la part de l’autre parent dans l’identité même de l’enfant. Ceci peut venir du parent mais aussi de l’enfant pour lui plaire. Ceci est toujours vrai dans le cadre d’un remariage où le parent aliénant va chercher à éliminer l’échec, la tache du passé dans une vie qu’il veut reconstruire comme parfaite.
Plus efficacement que des dénominations péjoratives, le parent aliéné peut être appelé par son prénom, afin de nier son rôle et les liens existant avec l’enfant. Cela lui sape du même coup toute autorité ainsi que la place particulière qu’il détenait jusqu’à présent dans la vie et la construction de l’enfant.
Plus grave, le parent aliénant (il s’agira alors de la mère) peut entamer une procédure pour changer le nom de famille de l’enfant. Elle lui donnera ainsi son nom de jeune fille ou le nom du beau-père. L’enfant est alors amputé de son passé et d’une partie de son identité.
Le prénom peut être remplacé dans les cas extrêmes. On rebaptise pour donner une nouvelle vie en quelque sorte, comme dans les sectes, ce qui majore encore la confusion identitaire et la dépersonnalisation.
3.4.2.5. Les techniques de manipulation (Voir Figure 4)
Il est intéressant d’étudier ces techniques afin de les repérer dans un conflit. L’accumulation de plusieurs de ces procédés doit alerter le praticien et l’inviter à éliminer un SAP. Plutôt que d’insister sur les techniques en elles mêmes, nous allons donner des exemples beaucoup plus parlants. Il est important de souligner que ces procédés sont utilisés spontanément par le parent aliénant et souvent en toute bonne foi. Il s’agit rarement d’un calcul, ce qui rend difficile leur repérage.
* La trilogie infernale
Comme dans la publicité, les techniques les plus éprouvées sont toujours les meilleures. La programmation, qu’elle se fonde sur des messages directs ou indirects, implicites ou explicites, verbaux ou non-verbaux, repose toujours sur ce trépied.
Répétition
Le message est répété jusqu’à ce qu’il soit considéré comme vrai, il s’agit d’un véritable « lavage de cerveau » ou « endoctrinement ».
Attention sélective
L’attention sélective consiste à diriger toute l’attention des enfants sur les qualités négatives de la cible. Parfois, aucun commentaire négatif ne sera émis, mais l’attention des enfants sera focalisée sur certains points à l’aide de questions afin de maintenir une perception manichéenne.
Abstraction contextuelle
En poussant l’autre parent à la faute, le parent aliénant focalise l’attention de l’enfant sur cette erreur pour justifier et aggraver le dénigrement. Ce peut être tout simplement « Désolé, je ne peux pas t’acheter ce jouet car papa ne me donne pas assez d’argent ». Mais, par la suite, le lien enfants aliénés/parent aliéné se dégradant de plus en plus, le parent aliéné poussé au désespoir du fait de son impuissance peut se mettre à hurler, injurier les enfants ou l’autre parent. Le parent aliénant s’empressera alors de « récupérer » le comportement du parent aliéné pour justifier ses propos : « Vois comme elle est hystérique ! » ou « Elle est vraiment incapable de comprendre que vous avez besoin d’affection après tout ce que vous avez vécu… »
* La toute puissance du parent manipulateur
Tous les prétextes sont bons pour asseoir son autorité et effacer l’ « autre » de la vie de l’enfant.
Mépris, intransigeance et suffisance pour exclure l’autre
Le ton utilisé pour évoquer l’autre est systématiquement péremptoire, hautain, dédaigneux, passionné : « Ah, ta mère, celle-là… » Le parent aliénant crée une méfiance permanente. Il peut par exemple choisir de filtrer tous les appels téléphoniques en laissant le répondeur branché en permanence, ou appeler toutes les dix minutes ses enfants lorsqu’ils sont chez l’autre parent, afin de leur demander si tout va bien.
Il va préférer systématiquement faire garder ses enfants par quelqu’un d’autre que le parent aliéné en cas d’absence. Il choisit d’utiliser une complicité malsaine entre enfants et parent aliénant pour ne pas donner d’informations à l’autre parent : par exemple pouffer de rire tous ensemble quand le parent aliéné laisse un message sur le répondeur que tout le monde entend sans décrocher.
Il encourage une perception manichéenne des faits chez l’enfant : « Ton père s’est mis en
colère : je savais bien qu’il était violent », « Ta mère a un ami, c’est vraiment une putain ! » Dans le cadre de la scolarité et des activités parascolaires, le parent aliéné ne sera jamais informé, ou avec retard, et le bloc parent aliénant/enfants aliénés se tiendra toujours soigneusement à distance du parent pestiféré si jamais ils sont amenés à se trouver dans la même salle pour une réunion. Un père ne sera pas informé du changement d’établissement de son enfant et se verra répondre par son propre enfant : « Mais si, tu le savais bien, de toutes façons, tu fais comme si tu n’étais jamais au courant ! »
Rationalisations et autres justifications
Il s’agit d’un mensonge ou d’une déformation de la réalité visant à masquer son refus de la présence du parent aliéné dans la vie de l’enfant. Si le parent aliénant est confronté à son méfait, il dira qu’il plaisante ou ergotera la signification des mots…
« Il n’y a pas assez de jouets chez elle. Elle se plaint toujours qu’il n’y a pas assez de jouets chez elle… » ou encore « Elle habite dans un quartier mal famé, je ne lui fais pas confiance pour garder les enfants. » Si le parent aliéné ne sait plus où sont scolarisés ses enfants car ils ont été changés d’établissement, « Il n’a qu’à demander, mais il ne cherche jamais à voir ses enfants… » alors que ses enfants refusent de le voir et l’insultent systématiquement. Dans le même ordre d’idée, si une mère ne reçoit pas les bulletins scolaires d’un petit garçon de 6 ans, le parent adverse prétextera respecter le choix de cet enfant qui ne souhaite pas le montrer à sa maman…
L’empiètement sur le temps de l’autre et le sabotage de la visite
La rigidité et inflexibilité horaire sont de mise : « Si tu les ramène une minute en retard, j’appelle la police… », « Si tu arrives une minute en retard, tu n’auras pas les enfants .» Chipoter sur les horaires précis des visites et gardes des enfants , empiéter sur le temps de l’autre exacerbent le climat de haute tension.
Un certain pharisaïsme associé à une notion de « vérité » et à une « sainte rage » évoquent irrémédiablement des prétextes religieux
« Ca ne m’étonne pas d’elle ! » Le message dénigre la cible et sous-entend que le parent aliénant est le plus propre, au dessus de tout soupçon.
La fermeture et l’intransigeance de cette nouvelle famille ressemble à un comportement sectaire. La notion de souillure et d’exclusion en découlent de fait. Le parent aliéné n’a pas le droit de pénétrer dans le nouveau domicile du conjoint, il reste à la porte si jamais il venait chercher ses enfants. Ce comportement peut être reproduit par les enfants qui, même en l’absence du parent aliénant, peuvent rester cloîtrés chez eux et ne même pas daigner ouvrir la porte à l’autre parent.
Des enfants changent systématiquement de vêtements lorsqu’ils se rendent au domicile du parent aliéné, ces vêtements sont réservés pour cet usage exclusivement. Toujours dans cette optique de souillure/pureté, une fille aliénée devenue adulte raconte comment sa mère accrochait systématiquement de l’ail, comme pour éloigner les vampires, si jamais son père venait à passer.
La notion de vérité est plus subtile: « Le copain de ta maman t’as montré son zizi, n’est ce pas ? Ça c’est la vérité. » Il s’agit de tromper l’enfant sur la notion de vérité. Celui-ci perçoit que « la vérité » correspond aux propos du parent aliénant. Cette manipulation est particulièrement redoutable car si l’on interroge ensuite l’enfant en lui demandant s’il dit la vérité, il répondra « oui » en toute bonne foi.
Les prétextes religieux sont très fréquents aux Etats-Unis, de toute façon, on flirte de très près avec l’aliénation de droit divin, position proche d’un dogme religieux : « Votre mère n’est pas seulement une mauvaise mère, c’est une pécheresse ! » Du coup, il est difficile de faire la part des choses entre sentiments personnels et impératifs moraux. Toutes ces techniques sont également utilisées dans les sectes.
* Renforcer la cohésion avec les autres et le lien symbiotique avec les enfants
Conspirer avec les autres pour renforcer la programmation ou « l’espionnage et les agents secrets »
Désigner le parent aliéné comme bouc émissaire à exploiter en donnant des « missions » à l’enfant se voit classiquement : encourager l’enfant à demander des cadeaux astronomiques, espionner, mentir, rapporter, dissimuler, voler des objets ou des documents. Le but est de renforcer la cohésion par la conspiration en n’hésitant pas à utiliser la communauté civile.
Souligner les engagements communs et la complicité
Tout ceci vise à instaurer un lien pseudo-incestueux avec l’enfant, qui se retrouve valorisé, en étant placé sur le même plan que l’adulte. Si la boulangère rend deux euros de trop, on partagera systématiquement avec l’enfant.
La collusion s’établit en utilisant le « nous » au lieu de la première personne, notamment pour certaines prises de décisions : « Nous allons très bien. » Si l’enfant se plaint que le parent cible l’oblige à faire ses devoirs avant de regarder la télévision, le parent aliénant répondra : « Elle te traite vraiment comme une gamine ! »
L’isolement
Le parent programmeur s’arrangera pour que l’enfant n’ait que des contacts limités avec toute personne ne partageant pas son opinion. Ceci est vrai surtout dans les premiers temps de la mise en place du SAP. Une fois l’habitude ancrée, nul besoin d’entretenir la programmation et les enfants deviennent fermés à toute information ne cadrant pas avec le dogme de leur réalité.
Les confidences
Certains parents n’hésitent pas à dévoiler à leurs enfants des détails de leur vie intime, parfois du fait de leur détresse, ou pleurent sur leur sort en leur présence, les plaçant ainsi sur un pied d’égalité et obtenant leur soutien inconditionnel.
La neutralité
Typiquement, un parent aliénant déclare : « Je respecte leur décision de ne pas aller voir leur mère s’ils n’ont pas envie », il assurera à son enfant qu’il le défendra quoi qu’il arrive pour faire respecter son opinion. En revanche, aller chez le dentiste ou la grand-mère du parent aliénant ne se discutera pas… On sous entend que ce n’est pas grave de ne pas aller voir l’autre parent, que ça n’a pas beaucoup d’importance. La version perverse : « Je respecte ton courage pour affirmer ton droit à être entendu », dira le parent aliénant. Ou encore, dans la double contrainte : « Tu dois y aller, si tu n’y vas pas, il va nous faire un procès, il ne nous payera pas la pension alimentaire… ».
La complaisance avec les enfants et la permissivité
La permissivité et l’« achat » des enfants en flattant leur immaturité ou en assouvissant tous leurs désirs (montagne de cadeaux, ne pas faire ses devoirs) sont des phénomènes très répandus. Le non-dit est clair : on fait croire à l’enfant qu’on le gâte pour le consoler du divorce et de la « méchanceté » de l’autre parent. De fait, les enfants développeront de la frustration vis-à-vis du parent aliéné.
Encourager les enfants à exploiter la cible
Cette manoeuvre très efficace consiste à transformer les attentes affectives des enfants envers l’autre parent en attentes matérialistes. Papa ou maman aliéné devient « le portefeuille ». Cette manoeuvre perverse met systématiquement l’autre en situation d’échec, car tous les cadeaux de la terre ne pourront remplacer l’affection d’un parent (ce que les enfants aliénés recherchent inconsciemment malgré tout), le parent aliéné ne donnera jamais assez.
Programmer les enfants contre les tentatives de déprogrammation
Le parent aliénant va tout de suite prévenir l’enfant pour le « protéger » de l’autre parent : « Méfie-toi, c’est un très grand manipulateur ». « Elle semble très gentille, mais c’est pour mieux t’enlever une fois que tu auras accepté d’aller chez elle. »
* Les messages négatifs sur la cible
« Tu nous harcèles »
C’est une accusation courante : par exemple, lorsque l’autre parent appelle au téléphone : « ils mangent », « ils font leurs devoirs », « ils sont avec des amis »… le moment choisi pour appeler n’est jamais le bon ! La moindre tentative de contact est considérée comme du harcèlement. « Si tu continues de nous mettre cette pression pour voir ton fils, on va se retrouver avec un suicide d’adolescent ! »
Projections sur le parent cible
Le Dr. Warshak, Psychologue américain spécialiste du SAP, cite l’exemple d’une mère qui ordonnait à sa fillette de 8 ans de garder son maillot de bain lorsque son père la lavait alors qu’il l’avait toujours baignée sans problème avant le divorce. Le message implicite est clair, le climat de suspicion est tel que l’enfant ne peut pas rester indemne dans cette situation de guerre et méfiance réciproque. Les projections peuvent être multiples, elles attribuent à tort à l’autre ses propres pulsions ou fantasmes inavoués.
Suggestions, insinuations et double contrainte
Un exemple de double contrainte serait : « Je pourrais te dire des choses sur ton père/ta mère qui te rendraient malades si tu le savais. Mais je ne suis pas le genre de parent qui critique un parent devant ses enfants ! » ou « Votre mère est au téléphone, voulez-vous parler avec elle ? » avec une mimique faciale suggérant de ne pas répondre.
Une technique particulièrement perverse consiste à encourager l’enfant à visiter l’autre parent en sachant pertinemment que la visite se déroulera mal. Au retour de celui-ci, mal à l’aise, le parent aliénant de souligner « Ha, tu vois dans quel état tu rentres ! » sur le ton catastrophé insinuant qu’il faut cesser de voir l’autre.
Messages ouverts
« Il est capable de tout ! »
Exagération du comportement négatif de la cible
« Il faut toujours que ta mère se présente comme une victime, elle fait croire à tous qu’elle est la plus malheureuse… »
Mensonges sur le compte de la cible
« Il gagne beaucoup d’argent mais il le cache pour ne pas nous en donner! », « Je ne voulais pas vous le dire, mais maman a tourné des films pornographiques dans sa jeunesse… »
Révisionnisme de l’histoire avec les enfants pour effacer tout souvenir positif de la cible
Tout est fait pour que le parent aliéné devienne un sujet tabou et que sa seule évocation déclenche l’angoisse dans le groupuscule parent aliénant/enfant(s) aliéné(s). Tout souvenir positif sera rabaissé, ou nié par le parent aliénant : «Comment peux-tu te souvenir que ta mère te prenait dans les bras : elle n’a pas dû le faire souvent, elle était tellement occupée ! »
Prétendre que le parent cible a totalement changé
Le parent aliénant profite de circonstances qui se rencontrent fréquemment après un divorce, lorsqu’il n’est pas rare que les gens changent de coiffure ou de style de vêtements, pour déclarer : « Depuis qu’il est avec cette femme, il est capable de n’importe quoi, il a complètement changé ! », C’est une affirmation très classique visant à rationaliser l’attitude agressive de l’enfant envers la cible.
Figure 4 : Les techniques de manipulation
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